Logo du site

Article publié le 12 février 2020.

Tract CGT et SUD Insee : Mobilités ! Quand la direction organise l’opacité

En début d’année les CAP de mobilité des agent·e·s C et CCP des enquêtrices et enquêteurs ont été purement et simplement annulées. La direction n’a même pas pris la peine d’en informer les agent·e·s pas plus que les organisations syndicales.

La raison de ces annulations ?

Le ministère a décidé de passer en force l’adoption des “lignes directrices de gestion” des mobilités validant la fin des CAP et des CCP. L’établissement de ces lignes directrices (LDG pour les intimes) fait suite à la loi de transformation de la fonction publique désormais appelée loi du 6 août 2019 qui « supprime, en son article 25, la compétence des CAP s’agissant des actes de mobilité et de promotion des agents. Dans ce cadre, elle prévoit l’édiction de lignes directrices de gestion dont le contenu et les conditions d’élaboration sont déterminées par le décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019. »

Alors que la loi laisse toute l’année 2020 pour la concertation, l’administration a imposé son texte en janvier malgré l’opposition unanime des représentant·e·s au comité technique ministériel.

Dans ce nouveau cadre, la Direction de l’Insee estime qu’elle ne peut plus tenir de CAP et CPP et doit désormais décliner ses propres lignes directrices directionnelles.

Le 4 février dernier se tenait un groupe de travail du CTR Insee sur ce sujet

La nouvelle réglementation supprime les compétences des CAP en matière de mobilité et de promotion. Depuis le vote de la loi l’été dernier, nous revendiquions auprès de la Direction de l’Insee la tenue de groupes de travail en lieu et place des CAP. La direction avait même mis en oeuvre cette solution. Déjà le manque d’information fournie était problématique et ne permettait pas aux élu·e·s de vérifier l’égalité de traitement entre les agents concernés par une demande.

Mais depuis lors, la direction a changé son fusil d’épaule et reste désormais intangible : “la loi ne permet plus de fournir des données individuelles aux élu·e·s en CAP, il est donc impossible de tenir une quelconque instance où serait examinée l’ensemble de la campagne.”

La direction propose pour seule solution d’organiser des réunions bilatérales avec les organisations syndicales en amont des décisions pour que les syndicats puissent remonter les cas “d’agent·e·s” qu’elles souhaitent porter à la connaissance de l’administration.

Pour nous cette proposition est inacceptable à plusieurs titres :

• Elle conduirait à mettre en concurrence les agent·e·s selon des critères totalement opaques et injustes : chaque syndicat défendrait les collègues qui l’auront contacté sans savoir si ce n’est pas au détriment d’un·e autre.
• Elle ajouterait à la confusion et laisserait faussement croire aux agent·e·s que les organisations syndicales ont un rôle à jouer dans les décisions alors que la réglementation offre tout arbitraire à la direction, sans moyen de contrôle effectif de ses décisions pour les organisations syndicales.
• Elle bafouerait le vote des personnels en ne prenant plus en compte la représentativité syndicale : même des organisations syndicales non représentées dans la CAP d’un corps pourraient intervenir dans les mobilités de ce corps puisque toutes les organisations représentées au CTR pourraient intervenir dans le processus.
• Elle ouvrirait la porte à tous les clientélismes de la part de syndicats mais aussi de la direction, ce qui nuirait gravement à l’indépendance des syndicats : à tout moment et sur tout sujet la direction pourrait faire du chantage à la défense des cas individuels. Elle pourrait en outre favoriser tel syndicat ou défavoriser tel autre, dans l’opacité la plus totale, par le biais des décisions individuelles.

Pour toutes ces raisons la proposition de la direction nous semble dangereuse.

Par ailleurs elle ne remédierait en rien à l’absence de transparence des campagnes de mobilité à venir, et elle renforcerait les risques d’arbitraire, de favoritisme d’injustice et de discrimination.

C’est pourquoi nous, CGT et SUD, avons clairement exprimé notre refus de principe de ces réunions bilatérales.

Nous ne refusons pas de défendre les agents mais nous ne pourrons pas le faire dans ce système opaque qui ouvre la porte à toutes les dérives.

Nous refusons de mettre en concurrence les collègues. Nous refusons de défendre les un.e.s contre les autres.

Nous avons des propositions !

Pour contrer les méfaits de ce nouveau cadre imposé et offrir un maximum de garanties aux personnels, nous avons mis sur la table un ensemble de revendications (au regard des documents fournis par l’administration) que nous défendrons lors du CTR du 25 février :

Pour toutes les campagnes de mobilité, quel que soit le corps
Nous demandons le maintien de GT en présence de l’ensemble des organisations syndicales en fonction de leur représentativité, répondant à certains critères (voir point ci-dessous) afin d’assurer une transparence globale des campagnes (mobilités géographiques telles qu’existant aujourd’hui et promotions)

Nous demandons la transparence la plus totale pour les agent·e·s concernant ces “lignes de gestion”, en amont et en aval des décisions qui les concernent. Cela passe par :
– la communisation des textes de référence
– une écriture précise des règles de gestion des demandes et des justificatifs demandés
– une priorisation des critères “subsidiaires” autres que ceux imposés par la loi
– l’exclusion de toute exigence supplémentaire qui ne figureraient pas dans les critères affichés, (critère d’âge, nombre de postes demandés, nombre d’établissements demandés…)
– la communication individuelle à chaque agent·e de son classement et des éventuels motifs de refus pour
chacune de ses demandes
– la présentation en comité technique d’un bilan précis et chiffré des différentes campagnes, notamment sous l’angle du respect de l’égalité professionnelle et de la non-discrimination des agent·e·s.

Concernant les mobilités “sur poste” (campagnes nationales pour les A, campagnes locales pour les B et C), nous demandons que “la motivation” de l’agent·e ne relève pas d’une appréciation lors d’un entretien, mais uniquement de l’ordre de ses demandes, et que toute mention au “bon fonctionnement de l’unité concernée par la demande de mobilité d’un agent”, porte ouverte à toutes les discriminations, soit supprimée des critères de décisions.

Pour les mobilités géographiques des agent·e·s de catégorie B et C, nous demandons que les demandes de mobilités entre différents établissements d’une même DR relèvent toujours de la campagne géographique nationale, et que les critères “subsidiaires” soient priorisés en prenant en compte d’abord l’ancienneté de la demande et ensuite l’ancienneté dans l’établissement d’origine

Pour les mobilités des agent·e·s de catégorie A et A+, nous demandons que les mêmes règles de transparence pour les postes s’appliquent aux postes décidés en comité de direction qu’aux postes présentés sur liste, ainsi que le respect de la priorité d’adéquation entre le classement du poste et le corps de l’agent·e·s en cas de concurrence entre des agent·e·s de corps différents.

Pour les mobilités des enquêtrices et des enquêteurs, nous demandons la priorité sur les demandes d’augmentation de quotité des enquêtrices et enquêteurs du réseau et que le deuxième critère pris en compte soit celui de l’ancienneté de la demande

Maintenant, c’est l’arbitraire !
Concernant les critères de priorité en matière de mobilité le cadre légal est celui défini par l’article 60 et 62bis de la loi du 11 janvier 1984 à savoir :
– agent·e·s dont le poste est supprimé dans le cadre d’une restructuration
– le rapprochement de conjoint (mariage ou PACS)
– l’atteinte d’un handicap quel qu’en soit le taux
– l’exercice de fonction dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles
– l’existence du centre de leurs intérêts moraux et matériels dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie
– la suppression de l’emploi (hors restructuration) avec impossibilité de réaffectation sur un emploi correspondant à son grade dans son service

Il est toutefois précisé dans le texte ministériel que « même dans les cas où les priorités légales peuvent s’exercer, l’autorité hiérarchique conserve son pouvoir d’appréciation en fonction des situations individuelles, des besoins du service ou de tout autre motif d’intérêt général. » Autrement dit, la hiérarchie peut contrevenir aux « priorités légales » quand elle veut puisque c’est elle qui définit les « besoins du service » et les « motifs d’intérêt général » et qui juge des « situations individuelles ». L’arbitraire institutionnalisé !

Soyons clair, c’était déjà un peu le cas avant. La direction avait tout pouvoir décisionnaire sur la mobilité des personnels. Sauf que jusqu’ici… il y avait des CAP, c’est-à-dire des instances formelles et paritaires qui permettaient a minima aux représentant·e·s élues et élus des personnels d’avoir une vision d’ensemble
de chaque campagne de mobilité et de contrôler l’absence de discrimination, de clientélisme, ou d’injustice flagrante

Retour en haut