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Article publié le 10 mai 2017.

Télétravail, pour qui, dans quelles conditions ?

Le décret du 11 février 2016 rend possible le télétravail dans la fonction publique. Un arrêté ministériel du 22 juillet 2016 en décrit les contours.
La direction de l’Insee a demandé une mission à l’inspection générale en novembre dernier afin « d’enclencher rapidement des expérimentations ».
Ce rapport a été examiné en comité de direction et est disponible.

Le bilan de ce qui existe déjà à l’Insee

Nous avons à plusieurs reprises demandé à la direction de l’Insee de réaliser un bilan des différentes formes de travail « atypiques » quant à la localisation des agents.
Elle avait jusqu’à présent refusé de le faire.
Pourtant il existe déjà des agents Insee dont le travail est « multilocalisé », ou travaillant en « site distant » (voir en fin d’article).
Impossible donc de savoir combien de collègues sont concernés. A notre connaissance, pas forcément exhaustive, cela concerne plus des « hauts cadres » que d’autres catégories d’agents. De plus, elle se fait « au cas par cas » donc forcément à la tête du client. Mieux vaut être bien vu pour y avoir droit !

A ne pas confondre avec les aménagements de poste pour raison de santé

Attention à ne pas confondre ces organisations du travail avec des aménagements de postes, à la demande expresse du médecin de prévention pour un agent dont la pathologie l’exige : ces aménagements existent et aboutissent parfois à une grande partie de travail à domicile, ou dans un autre lieu.
Mais même si l’aménagement de poste mis en place aboutit de fait à un travail à distance, il ne faut pas le qualifier de télétravail au sens du décret !

Sur le sujet des problèmes de santé, une nouvelle ordonnance du 19 janvier 2017 permet de demander, dès le début d’un arrêt de travail (et non après 6 mois comme auparavant) la mise en place d’un temps partiel thérapeutique.
Cette solution peut être intéressante pour des agents dont l’état de santé le leur permettrait, de rester lié à leur environnement professionnel.

En tout état de cause, le télétravail ne peut donc pas être une solution pour des agents malades qui souhaiteraient garder un lien avec leur travail et ainsi de bénéficier des effets positifs de cette socialisation maintenue : d’autres solutions, adaptées, existent.

Quels avantages / questions / risques sont posés par le télétravail ?

La direction explore des éléments sur le travail en site distant ou multi localisé : elle l’expérimente déjà malheureusement, suite à la réforme territoriale où elle a obligé des agents à quitter leur poste.
Mais la solution du travail à domicile pose des questions particulières que nous avons essayé de lister, de manière synthétique :

Avantages

  • éviter des temps de trajet fatigants, énergivores et chronophages
  • permettre de prendre du temps pour travailler plus au calme

Questions

  • quelles restrictions et sur quels travaux la direction de l’Insee le permettrait ?
  • en conséquence quels mécanismes pour empêcher des discriminations (catégorie, sexe, postes, implantations géographiques, âge, habitat...)
  • quels sont les droits et obligations à entrer et sortir du télétravail ?
  • quelles contraintes en terme de disponibilité, de charge de travail et de mesure de cette charge ?
  • quels coûts financiers pour les agents avec une mise au norme ergonomique au domicile, le paiement de l’assurance obligatoire lorsque le domicile est utilisé comme local de travail, la nécessité de place spécifique pour un poste de travail, la nécessité d’un abonnement internet de bon niveau (quid des zones non couvertes par l’Adsl ?). Sachant que l’arrêté ministériel est beaucoup plus restrictif en terme de prise en charge de l’administration, que ce que prévoit le décret de la fonction publique...

Risques

  • isolement de l’agent qui pourrait travailler chez elle-lui, et en parallèle quelles conséquences pour les collègues qui eux sont présents en permanence dans les équipes ?
  • l’expérience a montré à plusieurs reprises une augmentation de la charge de travail pour des agents travaillant à distance…
  • difficulté pour les responsables d’équipes pour arriver à gérer des agents dont tous n’ont pas les mêmes temps de présence sur place
  • les conséquences sur la vie privée : il est dit que le télétravail permettrait à des agents de résoudre des problèmes de garde d’enfants. Pour nous cette solution semble dangereuse aussi car elle obligerait le parent (souvent la mère !) à un exercice d’équilibrisme entre deux exigences incompatibles
  • perte de certaines garanties collectives comme des éléments des règlements intérieurs des établissements,
  • enfin, plus sur le fond : certains agents contourneraient des difficultés relationnelles et/ou de pressions en fuyant le lieu de travail : cela ne ferait que repousser le problème.

Des garanties doivent être données dans les instances paritaires faites pour : les CHSCT

La direction a missionné l’IG pour faire des propositions sur le télétravail. Nous rappelons pour notre part que les changements d’organisation du travail doivent être examinées dans les CHSCT (Comité hygiène et sécurité et conditions de travail).
Cette instance, que l’Insee contourne régulièrement, permettra d’associer les représentant-e-s du personnel, mais aussi les « préventeurs » que sont les médecins de prévention, les ergonomes, les inspecteurs santé sécurité au travail, pour veiller à ce que ce que souhaite la direction de l’Insee soit bénéfique à la fois pour les agents, et pour les collectifs de travail à l’Insee.

Sur le télétravail, ne laissons pas la direction décider pour nous !
A Paris le 10 mai 2017

Les différents travaux à distance à l’Insee
travail nomade : pratiquée par les agents dont les activités s’exercent, par nature, en dehors des locaux de l’employeur ; à l’Insee : enquêtes ménages, prix, enquête RP.
travail en site distant : vocable introduit avec la réforme territoriale pour les postes fermés : possibilité pour un agent, pendant 3 ans maximum, d’exercer ses activités sur un site distinct de celui d’une partie de sa hiérarchie et de ses collègues.
travail multi-localisé :
notion interne à l’Insee et définie par la note n°74/DG75-C920 de janvier 2014. Elle précise deux cas :
« 1/ L’agent accomplit une partie de son travail à son domicile.
Cette situation doit rester une exception, justifiée notamment par des considérations médicales attestées par le médecin de prévention. [...]
2/ L’agent partage son travail entre son établissement de rattachement (établissement A) et un autre établissement de l’Insee (établissement B). »

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