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Article publié le 9 mars 2022.

Des propositions pour des restaurants administratifs plus éco-responsables : l’argumentaire

Au sein du document accessible depuis ce lien, nous avons énuméré sous une forme volontairement condensée la liste des mesures à même selon nous de rendre le fonctionnement de notre restauration collective plus « éco-responsable ». Loin d’être le fruit de présupposés idéologiques, chacune de ces mesures est en réalité sous-tendue par un travail de documentation approfondi que nous avons tâché de résumer tout au long des lignes qui suivent. Si donc telle ou telle de nos propositions suscite en vous des questions ou tout simplement le désir d’en savoir plus, n’hésitez à vous reporter au paragraphe qui s’en fait écho.

Table des matières

  • Mieux connaître ce que l’on mange
  • Augmenter la part des produits locaux, bio et/ou issus du commerce équitable
  • Adopter une définition exigeante des catégories de produits « durables » que la loi Egalim impose d’introduire dans les lieux de restauration collective
  • Développer l’offre de repas végétariens ou végétaliens
  • Cesser de proposer dans les restaurants administratifs des aliments produits au sein de serres chauffées
  • Ne pas/plus s’approvisionner en produits acheminés par avion
  • Limiter l’approvisionnement en aliments connus pour être extrêmement gourmands en eau
  • Ne pas utiliser d’aliments contenant de l’huile de palme
  • Faire reculer la part des produits transformés
  • Privilégier les viandes blanches (poulet, canard…) aux viandes rouges (bœuf, agneau…) et s’approvisionner en priorité en viandes issues de l’agriculture biologique ou dotées d’un autre label de qualité et produites localement
  • Ne s’approvisionner qu’en poissons issus de modes de pêche compatibles avec la préservation de la ressource halieutique
  • Connaître les quantités de nourriture jetées chaque année dans chaque restaurant administratif
  • Veiller davantage à ce que les usagers reçoivent uniquement la quantité qu’ils souhaitent et non pas une ration qu’ils ne seront pas capables de finir ; leur donner la possibilité de pouvoir se resservir s’ils ont encore faim
  • Dans la mesure du possible, donner les produits non consommés à des associations ou les solder via des applications
  • Reproposer plusieurs jours d’affilée les restes
  • (Mieux) valoriser les déchets produits par les restaurants administratifs en développant le compostage, la méthanisation, le recyclage, les systèmes de consignes et la récupération des produits réutilisables (marc de café, restes de pain, restes de viande…)
  • Le cas échéant, cesser d’utiliser de la vaisselle à usage unique et ne plus proposer de bouteilles d’eau en plastique à la vente
  • Mieux informer les usagers sur les règles de tri en vigueur
  • Faire en sorte que les produits d’entretien et de nettoyage (liquide-vaisselle…) utilisés dans les restaurants administratifs soient dotés d’un écolabel
  • Mettre fin à l’impression automatique des tickets de caisse en privilégiant un système de facturation via des plateformes numériques, éventuellement doublé par l’envoi de SMS

Mieux connaître ce que l’on mange

Connaître la part de produits locaux, issus de l’agriculture biologique ou du commerce équitable dans chaque restaurant administratif permettrait d’identifier les leviers sur lesquels agir prioritairement, et ce au niveau local. Ces informations pourraient également permettre de mesurer les effets des actions entreprises pour faire évoluer le modèle alimentaire.
À noter que depuis le 1er janvier 2020, les restaurants collectifs dont l’État a la charge, doivent indiquer quelle est la part des produits qui satisfont à certains critères de qualité identifiés par le législateur parmi l’ensemble de ceux qu’ils utilisent, ainsi que la part des produits « issus de projets alimentaires territoriaux ». Ces informations doivent faire l’objet d’un affichage devant l’entrée de chaque restaurant administratif ainsi que de l’envoi d’un message électronique à destination des usagers. Cette double communication doit être renouvelée au moins une fois par an.

Augmenter la part des produits locaux, bio et/ou issus du commerce équitable

Grâce à un cahier des charges plus contraignant que celui auquel est astreinte l’agriculture conventionnelle, l’agriculture biologique contribue notamment à mieux préserver l’état des sols, la biodiversité et la ressource en eau et à réduire les émissions de gaz à effet de serre du fait du non-recours aux engrais et pesticides de synthèse et à un usage plus limité – en France tout au moins [1] – des serres chauffées [2] ; elle offre en outre l’avantage de permettre aux agriculteurs qui la pratiquent d’exercer leur activité sans mettre en péril leur santé via l’exposition aux pesticides, et leur fournit souvent de meilleurs revenus que ceux auxquels ils pourraient prétendre dans l’hypothèse où ils pratiqueraient leur activité de manière conventionnelle ; elle apporte enfin aux consommateurs de meilleures garanties sur un plan sanitaire [3].

Se nourrir en priorité auprès des producteurs locaux limite les transports de marchandises, et donc, en principe, les émissions de gaz à effet de serre qui leur sont inhérentes ; toutefois, hormis dans le cas des produits acheminés par voie aérienne, les transports ne contribuent en règle générale que pour une part limitée à l’empreinte environnementale des aliments ; inversement, même si les producteurs qui commercialisent en circuit court sont plus souvent engagés dans une démarche agroécologique que l’ensemble de la profession agricole [4], le fait qu’un aliment soit « local » ne garantit en rien que celui-ci n’a pas été produit moyennant l’usage de pesticides ou de serres chauffées. En revanche, les produits locaux ont l’intérêt de généralement comporter moins d’emballages que les produits importés sur de longues distances ; ils peuvent aussi, sous certaines conditions, contribuer à réduire le gaspillage alimentaire et les consommations d’énergie liées au stockage et à la conservation des aliments ; en rapprochant les producteurs des consommateurs, les circuits courts peuvent aussi œuvrer à un changement des pratiques et des exigences de part et d’autre ; enfin, sur un plan plus social, consommer local contribue au maintien de l’agriculture locale et des emplois qui en dépendent [5].
Tout en garantissant une juste rémunération des producteurs, les produits issus du commerce dit « équitable  » permettent de préserver l’environnement en ce sens que les modes de cultures et d’élevage qu’ils valorisent présupposent notamment un non-recours aux pesticides et aux OGM [6]. Le fait que les produits issus du commerce équitable soient souvent issus d’horizons lointains n’altère qu’en partie ce bilan environnemental positif dans la mesure où le transport par cargo ne représente en règle générale qu’une très faible part de l’empreinte environnementale des aliments [7].
Les surcoûts relatifs que pourrait entraîner l’augmentation de l’utilisation de tous ces produits – et plus particulièrement de ceux issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable – au sein des restaurants collectifs que nous fréquentons auraient toute légitimité à être reportés sur les budgets des plans « Insee Vert » et « Bercy Vert » actuellement en cours de déploiement. Ceux-ci pourraient également être au moins en partie compensés par la baisse du volume des subventions que l’État a consacrées à la prise en charge des repas de ses agents pendant la crise sanitaire en raison de la généralisation du télétravail, si toutefois ces économies n’étaient pas redistribuées aux personnels des restaurants administratifs (ce que nous avions demandé).

Adopter une définition exigeante des catégories de produits « durables » que la loi Egalim impose d’introduire dans les lieux de restauration collective

Conformément à l’article 24 de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable (« Egalim ), la circulaire sur les services publics écoresponsables oblige à compter du 1er janvier 2022 au plus tard les services de restauration collective de l’État à s’approvisionner à « 50 % en produits de qualité et durables dont au moins 20 % doivent être issus de l’agriculture biologique » (mesure n°12).
Si cette nouvelle mesure va évidemment dans le bon sens, force est néanmoins de constater à la lumière de deux études publiées récemment par Greenpeace, le WWF et le Bureau d’analyses sociétales pour une information citoyenne (Basic) d’une part etl’UFC-Que-Choisir d’autre part que certains des produits définis comme « durables » par le législateur n’imposent en réalité qu’un très faible niveau d’exigences, et ce aussi bien sur le plan environnemental que sur le plan socio-économique. Tel est notamment le cas des produits estampillés « Haute Valeur Environnementale » (HVE), des viandes porcines « Label Rouge » ou encore de certaines Appellations d’Origine Protégée (AOP Cantal, AOP Munster…). Tous ces aliments ne mériteraient donc pas d’être comptabilisés parmi les 50 % de produits « durables » censés être utilisés par les structures de restauration collective.

Développer l’offre de repas végétariens ou végétaliens

Si certains agents de l’Insee comme ceux de la DG ont déjà accès à un repas végétarien varié tous les jours, cette possibilité est en revanche encore loin d’être une réalité pour nombre de leurs collègues.
Dans bien des cas, les clients des restaurants administratifs qui souhaitent manger végétarien en sont en effet réduits à devoir se contenter des accompagnements. Or ces derniers ne permettent bien souvent pas de manger équilibré. L’absence de réel plat végétarien n’incite pas non plus les consommateurs à délaisser la viande ou le poisson.
Les repas végétariens et végétaliens ont pourtant une empreinte carbone globalement nettement moindre que les repas carnés [8] . Ainsi, d’après l’Ademe, « un menu végétarien peut avoir une empreinte gaz à effet de serre et sol 4 fois inférieure à un menu comportant de la viande bovine » [9]. Selon l’institut carbone 4, le passage à une alimentation intégralement végétarienne constituerait même de très loin le principal levier à notre portée pour réduire notre empreinte environnementale [10].
En vertu de la loi « Egalim » promulguée en novembre 2018, les gestionnaires des restaurants collectifs sont tenus de présenter à leurs structures dirigeantes un plan pluriannuel de diversification des protéines incluant des alternatives à base de protéines végétales dans les repas qu’ils proposent. La loi « Climat et résilience » promulguée en août 2021 va plus loin puisqu’elle oblige les « gestionnaires, publics et privés, des services de restauration collective de l’État […] à proposer quotidiennement le choix d’un menu végétarien » dès lors que plusieurs repas sont au menu. Cette mesure entrera en application à partir du 1er janvier 2023.
La possibilité de manger un plat végétarien ou végétalien tous les jours ne fait toutefois pas tout : pour que, concrètement, les agents puissent davantage adopter ce mode d’alimentation, il importe également que les tarifs des menus associés soient suffisamment attractifs. Dans cette perspective, des offres promotionnelles portant sur les plats végétariens ou végétaliens gagneraient à être mise en place pendant certaines semaines de l’année. À l’instar de l’idée des journées à thème « alimentation végétale », ce dispositif pourrait ainsi inciter certains agents à davantage se familiariser avec ce mode alimentaire.

Cesser de proposer dans les restaurants administratifs des aliments produits au sein de serres chauffées

Pouvoir produire des légumes d’été en hiver suppose de recourir à des serres chauffées, or ces dernières seraient10 à 20 fois plus émettrices de gaz à effet de serre que les serres classiques.
À l’inverse, la production de fruits et légumes de saison est généralement peu énergivore, et nécessite souvent moins d’emballages ou de conditionnements que les produits consommés hors saison.
À noter qu’en France, aucun légume d’été (tomates, aubergines, courgettes…) ne peut être vendu sous le label « AB » entre le 21 décembre et le 21 avril. À défaut de rendre impossible l’utilisation des serres chauffées en agriculture biologique,cette disposition en limite toutefois le recours. À noter également que, depuis la loi « Climat et résilience » d’août 2021, les restaurants collectifs dont les personnes morales de droit public ont la charge ont l’obligation de prendre en considération « la nécessité de respecter la saisonnalité » lorsqu’ils passent des marchés de fournitures ou de services de produits agricoles ou de denrées alimentaires.

Ne pas/plus s’approvisionner en produits acheminés par avion

À partir de la base de données FoodGES de l’Ademe, le site futura-sciences.fr estimeque « les fruits et légumes transportés par avion génèrent en moyenne 21,9 kg équivalent CO2/kg contre 1,3 kg de CO2 s’ils sont importés par bateau ou par camion et 0,3 kg de CO2 pour ceux produits localement ».
Les fruits et légumes transportés par voie aérienne ne représentant qu’une très faible part des aliments importés, leur suppression de l’assiette des consommateurs pourrait entraîner un bénéfice environnemental significatif sans pour autant bouleverser les habitudes alimentaires.
S’il n’existe malheureusement pas à ce jour de critère unique permettant d’être certain que tel ou tel aliment n’a pas été transporté par avion, certains éléments peuvent aider à s’en assurer. Ainsi, les produits consommés auront d’autant plus de chances d’avoir été acheminés par les airs que ceux-ci proviennent d’horizons lointains, ne correspondent pas aux saisons de production dans les pays où ils sont consommés ou encore sont trop fragiles et/ou trop rapidement sujets à péremption pour être transportés par la route ou par bateau lorsqu’ils sont importés…

Limiter l’approvisionnement en aliments connus pour être extrêmement gourmands en eau

Le développement de la culture de certains aliments particulièrement gourmands en eau tels les avocats entraîne dans certains pays un assèchement préoccupant des cours d’eau et des sols [11] .
Même si la France dispose encore de réserves hydriques importantes, cette problématique est également très prégnante dans certaines régions de métropole comme le sud-ouest, du fait notamment des volumes importants en eau qu’exige l’irrigation du maïs [12] .

Ne pas utiliser d’aliments contenant de l’huile de palme

La production d’huile de palme tend à fortement aggraver la déforestation et à détruire de nombreux écosystèmes [13]

Faire reculer la part des produits transformés

Comme l’indique l’Ademe, « plus un produit est transformé, conditionné, réfrigéré, plus il consomme de l’énergie ainsi que et des matières premières pour son emballage ».
De plus, l’abus de produits transformés pourrait être nocif pour la santé [14] dans la mesure où ces derniers contiennent souvent de fortes teneurs en graisses, en sucres ou en sel.
À noter qu’à l’instar de l’Agraf (Montrouge), certains restaurants administratifs auxquels ont accès des agents de l’Insee cuisinent déjà presque tous leurs aliments sur place.

Privilégier les viandes blanches (poulet, canard…) aux viandes rouges (bœuf, agneau…) et s’approvisionner en priorité en viandes issues de l’agriculture biologique ou dotées d’un autre label de qualité et produites localement

La surconsommation de viande rouge présente des inconvénients avérés non seulement sur le plan environnemental (augmentation des gaz à effets de serre, déforestation, consommations d’eau importantes, accaparement des terres arables…) [15], mais aussi d’un point de vue sanitaire (augmentation du risque de cancer et du risque d’AVC notamment).
Le bilan environnemental de l’élevage ne dépendant toutefois pas seulement du type de viandes mais aussi de leur mode de production [16] , il apparaît parallèlement nécessaire d’encourager la consommation de celles qui présentent le plus de garanties à ce dernier égard. Certains labels peuvent aider à l’identification de ces viandes [17] .
Il convient également de privilégier le recours à des viandes produites localement, afin d’éviter que leur transport ne dégrade de manière excessive leur bilan environnemental.
À noter que la loi « Climat et résilience » promulguée en août 2021 oblige les restaurants administratifs gérés par l’État à s’approvisionner exclusivement en viandes satisfaisant à au moins un des critères de qualité identifiés par le législateur. Cette dispositionentrera en vigueur au plus tard au 1er janvier 2024.

Ne s’approvisionner qu’en poissons issus de modes de pêche compatibles avec la préservation de la ressource halieutique

D’après l’ONG WWF, 31 % des stocks de poissons seraient actuellement surexploités, et ce chiffre atteindrait 93 % pour la seule mer Méditerranée [18]. De plus, nombreux seraient les poissons consommés avant qu’ils aient atteint leur maturité sexuelle ainsi que ceux pêchés dans des conditions ne garantissant aucune sélectivité (chaluts, sennes…) et/ou bouleversant l’écosystème marin. En outre, une grande part des poissons pêchés le seraient pendant leur période de reproduction [19] .
Face à tous ces problèmes menaçant la pérennité de la ressource, l’élevage conventionnel ne saurait constituer un remède acceptable. En effet, l’alimentation des poissons de ce type d’élevage contribue fortement à la surpêche [20], et leur surconcentration est source de maladies contre lesquelles tendent à être déversées d’importantes quantités de pesticides et de médicaments.
S’il est encore actuellement difficile de savoir quels poissons consommer de manière environnementalement responsable, des guides tels que ceux édités par Environnement Brussels ou par le WWF donnent un certain nombre de recommandations utiles. Il existe par ailleurs un certain nombre de labels dont la plupart sont malheureusement assez controversés (MSC…) ou bien encore trop peu usités (Pêche Durable...) [21] .
À noter que la loi « Climat et résilience » promulguée en août 2021 oblige les restaurants administratifs gérés par l’État à s’approvisionner exclusivement en poissons satisfaisant à au moins un des critères de qualité identifiés par le législateur. Cette dispositionentrera en vigueur au plus tard au 1er janvier 2024.

Connaître les quantités de nourriture jetées chaque année dans chaque restaurant administratif

D’après l’Ademe, chaque repas servi par les restaurants d’entreprise générerait en moyenne 95 g de gaspillage alimentaire38. LeMinistère de l’Agriculture estimait pour sa part ce chiffre à 125 g dans une étude réalisée en 2011 [22].
Pour mieux lutter contre ce phénomène générateur, entre autres conséquences, d’un surcroît d’émissions de gaz à effet de serre, d’une consommation inutile d’importants volumes d’eau et de gigantesques surfaces de terres arables et d’un déversement de pesticides superflu [23] , la loi de Transition énergétique pour la croissante verte a obligé « l’État et ses établissements publics [à mettre en place] avant le 1er septembre 2016 une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire au sein des services de restauration collective dont ils assurent la gestion ». Avec la loi Egalim de novembre 2018, cette obligation a été étendue aux opérateurs de la restauration collective privée.
Pour mieux identifier les principaux leviers à actionner mais aussi pour mesurer les progrès accomplis en la matière d’année en année, ces nouvelles obligations supposent en premier lieu que l’on puisse disposer d’informations sur le volume et la nature des aliments jetés chaque année dans chaque restaurant administratif.

Veiller davantage à ce que les usagers reçoivent uniquement la quantité qu’ils souhaitent et non pas une ration qu’ils ne seront pas capables de finir ; leur donner la possibilité de pouvoir se resservir s’ils ont encore faim

Malgré les efforts entrepris par certains gestionnaires, il arrive que les portions servies dans les restaurants administratifs ne soient pas toujours adaptées aux appétits des uns et des autres. Les agents peuvent ainsi recevoir des assiettes qu’ils ne seront pas capables de finir.
Pour lutter contre ce gaspillage alimentaire, il serait préférable de réduire les portions servies initialement, tout en donnant la possibilité à ceux qui le souhaitent d’aller se resservir s’ils ont encore faim.
Une solution complémentaire pour parvenir à ce résultat consisterait à encourager les employés des restaurants administratifs et leurs usagers à davantage communiquer, de manière à parvenir à des portions plus individualisées. Cette politique est notamment celle que suit l’Agraf à Montrouge.

Dans la mesure du possible, donner les produits non consommés à des associations ou les solder via des applications

Promulguée en novembre 2018, la loi « Egalim »laissait un délai d’un an aux opérateurs de la restauration collective (publique et privée) préparant plus de 3 000 repas par jour pour proposer une convention de dons à une association habilitée.
Cette action pourrait être complétée par un recours accru aux applications numériques qui, à l’instar de toogoodtogo, permettent de solder les produits alimentaires en passe d’être jetés.

Reproposer plusieurs jours d’affilée les restes

Reproposer aux usagers les restes non consommés de la veille ou de l’avant-veille constitue un autre moyen très simple de lutter contre le gaspillage alimentaire. Cette possibilité suppose naturellement que les aliments en question aient été conservés dans les meilleures conditions et que ceux-ci soient encore comestibles d’un point de vue sanitaire et aient encore du goût.
(Mieux) valoriser les déchets produits par les restaurants administratifs en développant le compostage, la méthanisation, le recyclage, les systèmes de consignes et la récupération des produits réutilisables (marc de café, restes de pain, restes de viande…)
Réalisé dans de bonnes conditions, le compostage des déchets alimentaires permet de produire des matières organiques fertilisantes (« compost ») tout en réduisant le volume de déchets collectés [24] .
La méthanisation peut également permettre de valoriser les déchets alimentaires : grâce à ce procédé, ces derniers sont en effet utilisés pour produire aussi bien de la matière organique fertilisante que du biogaz.
En outre, certains « déchets » alimentaires peuvent trouver une seconde vie : tel est notamment le cas des huiles de cuisson, qui peuvent être récupérées afin d’être réutilisées dans le cadre de la production de biocarburants, dans la chimie ou encore dans l’alimentation animale, du marc de café, qui peut notamment être employé comme un engrais naturel, des restes de viande, qui pourraient être donnés à des chenils, ou des restes de pain, qui pourraient venir compléter l’alimentation des animaux d’élevage.
Aujourd’hui, les organismes qui produisent plus de 10 tonnes de biodéchets par an sont dans l’obligation de les trier à des fins de valorisation. À compter du 1er janvier 2023, cette obligation sera étendue à toutes les structures produisant plus de 5 tonnes de biodéchets par an. Celle-ci sera ensuite généralisée à l’ensemble des producteurs de déchets après le 31 décembre 2023.

Au-delà des déchets strictement alimentaires, les restaurants administratifs génèrent toute une série de déchets d’emballage ou de conditionnement dont certains pourraient utilement trouver à être consignés. En effet, les systèmes de consigne et de réemploi constituent une solution intéressante sur le plan écologique dans la mesure où ils nécessitent généralement moins d’énergie que le recyclage, dès lors que les plateformes de prise en charge se situent à une distance raisonnable des lieux de consommation [25] .
Qu’ils puissent ou non être consignés, les déchets recyclables localement que produisent les restaurants administratifs doivent à tout le moins pouvoir être collectés. Il s’agit du reste, depuis 2016, d’uneobligation à laquelle sont assujettis les restaurants administratifsdès lors que les déchets qu’ils produisent sont collectés par un prestataire privé ou que l’ensemble des déchets générés sur le site dont ils dépendent représentent un volume supérieur à 1 100 litres par semaine.

Le cas échéant, cesser d’utiliser de la vaisselle à usage unique et ne plus proposer de bouteilles d’eau en plastique à la vente

La production de matières plastiques est consommatrice d’énergie fossile (pétrole) et source de pollutions (océans, sols, air…) d’autant plus conséquentes que la grande majorité des plastiques ne sont aujourd’hui pas recyclables et qu’une partie importante d’entre eux sont à usage unique [26] .
Pour tenter de lutter contre ce phénomène aux conséquences dramatiques sur la biodiversité, il est impératif de combattre la production de plastiques à la source. C’est notamment ce qu’a tenté de faire la loi « Egalim » de novembre 2018en interdisant les ustensiles à usage unique en matière plastique (assiettes, verres, couverts…) dans la restauration collective à compter du 1er janvier 2020.
Par ailleurs,la même loi interdit les bouteilles en plastique dans la restauration scolaire. Au vu de l’importance de la pollution plastique qu’engendre ce mode de consommation [27] , cette mesure gagnerait à être étendue à l’ensemble du secteur de la restauration collective.
Par ailleurs, au-delà de la seule question du plastique, il conviendrait d’interdire tout type de vaisselle à usage unique (y compris les assiettes et les gobelets en carton) afin d’éviter de simplement substituer un type de déchet à un autre.

Mieux informer les usagers sur les règles de tri en vigueur

Déjà expérimentée dans certains restaurants administratifs auxquels ont accès des agents de l’Insee, cette initiative simple à mettre en œuvre permettrait de décharger les personnels administratifs d’une partie des opérations de tri. Elle peut aussi avoir pour effet de sensibiliser les agents à l’importance que représentent les déchets engendrés par la restauration collective et à la nécessité d’en réduire le volume.

Faire en sorte que les produits d’entretien et de nettoyage (liquide-vaisselle…) utilisés dans les restaurants administratifs soient dotés d’un écolabel

Outre leur nocivité pour la santé, les produits d’entretien classiques entraînent une pollution de l’air mais aussi de l’eau. Il existe pourtant sur le marché des produits plus respectueux de l’environnement, repérables via différents écolabels (« EU Ecololabel », « Nature et Progrès »…).

Mettre fin à l’impression automatique des tickets de caisse en privilégiant un système de facturation via des plateformes numériques, éventuellement doublé par l’envoi de SMS

Chaque jour, la plupart des restaurations administratifs éditent autant de tickets de caisse qu’ils servent de repas. Si chacun de ces tickets ne représente en soi qu’une empreinte environnementale relativement dérisoire, leur accumulation tout au long de l’année nécessite cependant au total une quantité conséquente d’encre et de papier [28] .
Aussi le législateur a-t-il récemment décidé de n’autoriser à l’avenir les établissements recevant du public à n’imprimer des tickets de caisse que si le client en fait explicitement la demande. Cette mesure entrera en vigueur au plus tard au 1er janvier 2023.
Dans le cas de la restauration collective, l’impression du ticket de caisse paraît d’autant plus superflue que la plupart des restaurants administratifs possèdent aujourd’hui une plateforme numérique grâce à laquelle leurs usagers peuvent déjà connaître le solde dont ils disposent, ainsi que leur historique de facturation.
Ceux qui souhaiteraient néanmoins connaître combien leur coûte leur repas directement lors du passage en caisse pourraient demander à recevoir leur facture par SMS, à l’instar de ce qui se pratique déjà dans certaines enseignes de grande distribution.

Notes

[1En France, aucun légume d’été (tomates, aubergines, courgettes…) ne peut être vendu sous le label « AB » entre le 21 décembre et le 21 avril. À défaut de rendre impossible l’utilisation des serres chauffées en agriculture biologique, cette disposition en limite toutefois le recours (https://www.consoglobe.com/le-chauffage-des-serres-bio-autorise-sous-conditions-cg ).

[2 On estime que le fait de produire un légume au sein d’une serre chauffée serait 10 à 20 fois plus émetteur de gaz à effet de serre que le fait de le produire au sein d’une serre classique

[3Sur tous ces sujets, voir notamment : https://www.greenpeace.fr/pourquoi-manger-bio/

[4Ademe, « Alimentation – les circuits courts de proximité », in Les avis de l’Ademe, juin 2017,(https://www.20minutes.fr/planete/403185-20100507-commerce-equitable-est-il-compatible-protection-environnement)

[5Sur tous ces sujets, voir notamment : Ademe, « Alimentation – les circuits courts de proximité », in Les avis de l’Ademe, juin 2017 (https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis-ademe-circuits-courts.pdf)

[7Sur l’impact environnemental des circuits courts en général, voir notamment l’étude l’Ademe précitée (https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis-ademe-circuits-courts.pdf). Sur en particulier l’impact environnemental du transport longue distance sur les produits issus du commerce équitable, lire notamment : https://www.20minutes.fr/planete/403185-20100507-commerce-equitable-est-il-compatible-protection-environnement

[9Ademe, Vers une alimentation plus durable en restauration collective, Clés pour agir, juin 2021, p.16

[10Carbone 4, Faire sa part ? Pouvoir et responsabilité des individus, des entreprises et de l’État face à l’urgence climatique, juin 2019, p.9 (https://www.carbone4.com/wp-content/uploads/2019/06/Publication-Carbone-4-Faire-sa-part-pouvoir-responsabilite-climat.pdf)

[15Voir notamment : Enjeux sanitaires et environnementaux de la viande rouge, Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, note n°26, avril 2021, p.1-3

[16Dans sa note n°26 consacrée aux « Enjeux sanitaires et environnementaux de la viande rouge », l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques cite une étude récente dans laquelle il apparaît que si, en moyenne, la production de 100 g de protéines animales engendre en moyenne 25 kg de gaz à effet de serre en équivalent-carbone, cet effet n’est que de 9 kg pour le premier décile contre 105 kg pour le dernier décile

[17Attention cependant : comme l’ont montré deux études publiées récemment par Greenpeace, le WWF et le Bureau d’analyses sociétale pour une information citoyenne (Basic) d’une part et l’UFC-Que-Choisir d’autre part, tous les labels alimentaires sont loin de se valoir : si certains, comme le label « Agriculture biologique », présentent des garanties importantes pour le consommateur, d’autres sont en revanche beaucoup moins fiables. En outre, d’une filière à l’autre, un même label peut renvoyer à des niveaux d’exigence très différents. Dans le cas de la viande, par exemple, ces études montrent que les volailles estampillées « Label Rouge » présentent ainsi beaucoup plus de garanties que les porcs « Label Rouge », ce tant sur le plan environnemental que sur un plan socio-économique. Pour en savoir plus : https://www.greenpeace.fr/espace-presse/labels-alimentaires-et-signes-de-qualite-promesses-non-tenues-une-revision-simpose/

[19Sur tous ces problèmes, voir notamment : https://www.quechoisir.org/decryptage-peche-durable-manger-des-poissons-en-bonne-conscience-n62050/, https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/GIDS_PoissonDurable_FR.pdf et https://www.wwf.fr/projets/consoguide-poisson-ou-comment-consommer-du-poisson-differemment

[20Ainsi, l’organisation Brussels Environnement rapporte que plus d’un quart des produits issus de la pêche seraient consommés pour les besoins de l’aquaculture (Guide des poissons durables, Brussels Environnement, p.7)

[21Pour une présentation plutôt complète de l’ensemble des labels liés à la pêche durable, voir par exemple :
https://www.quechoisir.org/decryptage-peche-durable-manger-des-poissons-en-bonne-conscience-n62050/

[22Ministère de l’Agriculture de l’Alimentation de la Pêche de la Ruralité et de l’Aménagement du Territoire (MAAPRAT), Pertes et gaspillages alimentaires dans les métiers de la remise directe, Paris, 2011, p.5

[28Sur l’impact environnemental et sanitaire des tickets de caisse, voir notamment : https://zds.fr/les-tickets-de-caisse-et-leurs-impacts-environnementaux/

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